Interview de Franck Chevallereau, responsable de l’école des assistants

L’école des assistants… parler, s’exprimer, se dévoiler, écrire, enseigner…
Il y a forcément une mise à nu dans chacune de ces actions. Ouvrir une porte sur notre ressenti, sur nos doutes, nos espoirs, sur notre âme, nos forces, nos faiblesses, ou comme le disent les combattants : sur nos « ouvertures ». Un des dangers ultimes redoutés par le guerrier. Pourtant nous sommes en plein dedans lorsqu’il s’agit d’enseignement en général, notamment d’arts martiaux.

La démarche de tout artiste est d’exprimer, au travers de la technique propre à son art, ce qu’il a au plus profond de lui, sa vision, son message, sa personnalité. Il arrive cependant un moment où l’artiste s’aperçoit que c’est l’art qui lui permet de définir le message. Qui le façonne et lui permet de se définir en tant qu’individu.
Le cheminement normal d’un artiste martial commence par la pratique de soi, pour soi. Puis elle évolue vers et à travers l’autre. Puis on revient à soi. Puis on décide d’enseigner aux autres. Je ne crois pas qu’enseigner ou se dévoiler soit quelque chose de naturel. Pourtant c’est une étape nécessaire et je pense pouvoir parler au nom de tous les instructeurs de France Haidong Gumdo en disant que l’enseignement aide à se définir, à clarifier sa pratique. On avance beaucoup plus vite dans notre compréhension lorsqu’on doit expliquer à d’autres nos découvertes. Pourtant, pour cela, il faut se livrer à cœur ouvert. Se mettre en danger devant ses élèves. Donner ce qu’on a de meilleur à chaque instant. Abandonner l’idée de devenir une étoile qui brille intensément un court instant pour ne rester qu’une balise qui guide l’élève tout au long de sa vie de pratiquant.

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Franck et ses assistants Huoy et Lorick,

Ju Jak Dojang, Paris 8 Haidong Gumdo

Notre club concrétise le fruit de nos passions. D’une part, il est le lieu par lequel nos élèves évoluent, mais il est aussi révélateur de nos imperfections d’Homme, mettant au grand jour nos faiblesses, nos errances, nos défaillances… notamment lors des rencontres régionales, nationales, ou même lors de stages découverte… Allons-nous être « validés » par nos pairs ?
Aussi, le choix d’un assistant est une étape décisive où la confiance revêt une importance capitale… Cette étape constitue un temps symbolique fort où l’on va remettre les clés de notre « bébé », notre club, à quelqu’un d’autre.

Faire confiance à son assistant, le protéger… mais pas trop pour lui offrir un environnement propice à son épanouissement. Alors on comprend que le club doit vivre par lui-même, qu’on n’est rien que celui qui a allumé l’étincelle des premiers instants et insufflé de l’énergie jusqu’à ce que la lumière puisse briller d’elle-même… pour que les élèves puissent à leur tour s’épanouir. On est bien loin alors du coq au milieu de sa basse-cour.

Si je vous parle de tout cela c’est qu’on a tous devant les yeux l’image du Maître surpuissant, parfait. Celui qui ne doute pas. Qui ne fait jamais d’erreur. Finalement l’homme qui est arrivé au sommet, qui a reçu l’illumination. On rêve tous de cela. Ça doit être génial d’être parfait.
La vérité, cependant, est tout autre. Elle est peut-être même mieux, qui sait ? Certains élèves ont eu la chance de le voir, de le vivre, je vous invite d’ailleurs à relire le témoignage de Chloé qui a assisté à une école des cadres.

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Chers élèves je pense que vous avez devant vous des êtres qui essaient chaque jour d’aller au-delà de leurs limites, avec leurs faiblesses et leurs doutes, pour vous permettre d’apprendre le Haidong Gumdo. Des personnes comme vous, ni plus ni moins, qui font des efforts inimaginables, comme vous, pour aller vers les autres, pour partager, pour vous rendre meilleurs qu’ils n’espèrent le devenir eux-mêmes. Avec sincérité, avec humilité. Chers élèves vous n’avez pas choisis la route la plus simple, mais elle vous mènera vous aussi à devenir des êtres sincères et humbles.

Chers instructeurs, chers assistants, j’ai un respect profond pour ce que vous êtes, ce que vous faites, ce que nous faisons tous ensemble. Tout cela rejaillit sur le Haidong Gumdo français et c’est autant un plaisir qu’un honneur que de passer des weekends comme le dernier passé à Lyon, tous réunis.
A toutes et à tous, merci d’offrir un futur au Haidong Gumdo français, à notre tradition et à cette famille chaque jour plus grande que nous réunissons.
Je vous dis à très bientôt sur le tapis !
Haidong