Gungdo, le tir à l’arc coréen, une affaire de tradition

La plupart des historiens s’accordent pour dire que les premiers arcs datent d’environ 5000 ans avant JC en Corée. Selon les chinois, les coréens ou donggyjok étaient « ceux qui venaient de l’est et qui maîtrisaient le tir à l’arc ». La légende dit que le premier roi fondateur du royaume de Goguryeo était un maître en la matière, qu’il pouvait toucher 5 mouches en même temps à l’aide d’une seule flèche…

Cet art est toutefois resté l’apanage des militaires : un passage obligé lors de l’entraînement et des examens tout le long de la période Joseon (de 1392 à 1910). Maîtriser le tir à l’arc était nécessaire pour devenir officier à cette époque. Les qualités développées alors à force de pratique allaient de pair avec la progression technologique de l’armement (flèches en bois, en métal, flèche courte, arbalète). L’examen comprenait  tant des épreuves de tir à l’arc au sol qu’à cheval.

Une des innovations majeures coréennes est la flèche « courte », ou pyeonjeon. Sa longueur représentait à peu près le tiers d’une flèche normale, ce qui avait pour avantage de la rendre plus rapide, plus précise et inutilisable par les camps adverses. Un tube en bambou était monté sur l’arc de manière à guider la flèche.

Sa puissance et son efficacité était si renommée dans les pays avoisinants, que des délégations coréennes étaient invitées, notamment en Chine et au Japon, pour faire des démonstrations.

La population même pratiquait le tir à l’arc au cours d’une sorte de compétition, le hyangsarye, destinée à resserrer les liens de la communauté, et à maintenir les coutumes. C’est vers la fin du 19eme siècle que le tir à l’arc devint un art récréationnel et l’objet d’une pratique standardisée. A ce titre, la distance de la cible est de 145 mètres en Corée, soit plus du double de la distance pour l’arc occidental (70m) et l’arc japonais (80m).

Gakgung, l’arc traditionnel coréen, ou Guk Gung, (arc national) est un arc courbe composite. Sa fabrication est considérée comme un trésor national depuis 1971 en Corée. Il se présente sous la forme d’un anneau quand la corde n’est pas tendue. Il se distingue par sa petite taille et ses branches courbes. Il appartient à la famille des composites, car il est le résultat d’un assemblage de plusieurs matériaux.

Des tendons déroulés et aplatis sont mêlés à de la colle de vessie de poisson sur la partie antérieure des branches. Ils viennent recouvrir le cœur en bambou, tandis que la partie ventrale de l’arc se compose essentiellement de corne de buffle d’eau.

Le bambou est une graminée. Il a une structure creuse qui le rend léger, des fibres longitudinales qui le rendent particulièrement flexible, et enfin des entre nœuds pleins qui lui donnent des performances supérieures au bois. A la fois flexible et dur du fait de sa haute teneur en silice, le bambou est par conséquent un matériau idéal pour construire un arc léger, souple, avec une résistance mécanique très forte.

Ainsi les tendons effectuent une poussée de la partie antérieure à la partie ventrale de l’arc, tandis que la corne de buffle impose une contrainte en sens inverse, ce qui équilibre l’ensemble et contribue à optimiser le rapport entre la taille de l’arc et le degré de tension de la corde.

Les coréens utilisent le pouce, parfois aidés d’un anneau, pour tendre la corde jusqu’au niveau de l’oreille avant de décocher la flèche. L’arc en lui même ne comprend pas de viseur et la flèche vient reposer sur le pouce de l’autre main qui tient la poignée de l’arc.

Pour finir, la légèreté, la maniabilité et la puissance de ces arcs permet d’armer des unités très mobiles pouvant utiliser l’espace à 360 degrés (le cheval avance alors que le cavalier peut tirer en arrière) pour des tirs à distance variable. A cela vient s’ajouter une inclinaison de l’arc à 45 degrés qui augmente la distance parcourue par la flèche pour atteindre des cibles plus ou moins lointaines.

Michèle, cadre à l’École des cadres