Interview de Maître Capozzi

Maître Capozzi, vous venez de recevoir le titre de Grand Maitre par la World Haidong Gumdo Federation symbolisé par le Hwang Yong Dobuk. Pouvez vous nous en dire plus ?

En effet, à l’occasion de mon dernier voyage en Corée, le Président Kim Jeong Ho a demandé à Maître Han Sang Hyun de m’attribuer ce titre et ce symbole.

Pour intégrer ce que cela signifie il faut bien comprendre qu’il ne s’agit nullement de dogmatisme, mais bien au contraire de symbolisme.

Dans un premier temps, le Président Kim a codifié le Haidong Gumdo et il a décidé de m’attribuer cette position. Il est mon Maître et mon aîné, outre les qualités exceptionnelles dont il est doué, je le respecte et lui fais confiance. S’il en a décidé ainsi c’est qu’il estime que je le mérite.

Je n’en tire pas de gloire et je ne tends pas à l’auto satisfaction sur ce « statut », mon objectif de pratiquant n’a jamais été d’obtenir un dobuk de couleur, un titre ronflant, ni que l’on nettoie le sol à mon passage…je n’ai pas d’égo surdimensionné…aucune démagogie.

Dans un second temps, et pour reprendre la notion de symbolisme, il s’agit globalement du plus haut « grade » du Haidong Gumdo, dans sa signification profonde, et cela dépasse de très loin la notion de DAN…..qui nous relie à la notion de « maître d’armes »….dans notre discipline, cette distinction n’est pas galvaudée. Elle prend sa noblesse dans l’engagement et le don de soi à autrui.

Le dobuk dragon peut donc être compris à la fois comme un rang et un statut, mais aussi des qualités, précisant que le pratiquant est reconnu de ses pairs pour disposer de l’ensemble des qualités optimales d’humilité, de technique, de pédagogie, d’organisation et d’humanité qui font de lui un maître d’armes « juste » selon la vision et les préceptes du Haidong Gumdo idéal.

Quelles sont les implications et les conséquences d’un tel titre dans votre pratique, votre enseignement et vos fonctions ? 

Je pourrais vous retourner la question « que représente pour vous un maître? »….

Pour ma part, si je synthétise de la manière la plus courte, cela se résume à « être encore plus au service de…. ».

Si je prends la question au pied de la lettre, je ne sais pas si je suis un maître d’armes, et encore moins si je suis « juste ». Visiblement il semble que je sois « reconnu comme tel », mais à mon sens, cela reste un idéal à atteindre.

Etre un «maître d’armes », c’est réellement très difficile car la pratique d’une arme est en soi une véritable épreuve, sur tous les plans… Ensuite, « être au service de… » requiert un degré très élevé de compréhension, d’autonomie, de compassion, d’écoute, et de respect… Il faut faire énormément d’efforts, en avoir conscience, et ne pas le faire de manière intéressée pour soi-même….Ce véritable dépouillement nécessite d’être soi-même et d’être honnête….je suis très à cheval sur ces principes même si je suis imparfait comme tout le monde.

Au niveau de mes « fonctions, de mon enseignement et de ma pédagogie », cela me rappelle à mes obligations, tout simplement. Et même si sur ce point, rien ne change, il est évident que je prends la juste mesure de la tâche et que je me dois d’aller beaucoup plus loin….

Vous êtes à l’origine du développement du Haidong Gumdo en France, et en même temps, en qualité de Secrétaire Europe très impliqué dans le Haidong Gumdo Européen. Au regard de votre expérience, êtes vous en mesure de définir une « French touch »? Si c’est le cas, pouvez vous en décrire les caractéristiques?

Je ne sais pas s’il convient de parler de « French touch » et si c’est même bien délicat….

Le Haidong Gumdo ne m’appartient pas, j’en suis un des représentants.

Néanmoins, il est vrai que je revendique « mon style » à la fois dans la pédagogie, dans l’organisation, dans la technique….je suis d’un profil rigoureux et j’ai beaucoup de mal à faire de l’à peu près et de m’en satisfaire.

Dire d’une technique « il faut la réaliser comme ça, parce que c’est comme ça », cela ne me suffit pas. Il en va de même pour l’organisation ou pour le reste.

Donc si la « French Touch » est de fait marquée par une recherche de clarté, de transparence, de sincérité et d’optimisation de l’organisation, alors oui, nous pouvons en parler. Ceux qui souhaitent se revendiquer de mon « style » ou de mon approche assument leurs choix je pense.

Pour terminer, avec le recul qui est le vôtre aujourd’hui, quel conseil donneriez-vous aux nouveaux pratiquants et particulièrement à ceux qui intègrent l’Ecole des Cadres ?

Pour tous les pratiquants, en fonction ou en devenir, je pense qu’il convient dans un premier temps de pratiquer sérieusement sans se prendre soi-même au sérieux…..ne pas se prendre ou s’estimer pour ce que l’on n’est pas, et avoir autant l’honnêteté que l’humilité du débutant avec sa vraie soif d’apprendre, de s’enrichir. Il ne s’agit pas strictement de principes techniques, mais de tout un ensemble, comme par exemple apprendre des autres, et s’enrichir de leurs qualités.

Etre « soi », conforme aux principes que l’on pétrit dans nos dojangs, avec comme valeur absolue le plaisir et le respect sans oublier l’intégrité dans la pensée, le geste et l’intention.

Pour finir, enfin, faire ce que l’on dit et dire ce que l’on fait. Je trouve cette maxime très appropriée, d’autant quand il s’agit de valeurs….car tout ce que nous pétrissons au fil de nos pratiques ne vaut que par la véracité des valeurs que nous mettons en avant, tous et chacun.

Voilà les conditions qui me semblent à minima requises pour pouvoir avancer sereinement et sans heurter quiconque ou quelque principe fondateur…

La rédaction : Nous vous remercions d’avoir pris le temps de répondre à nos questions et vous félicitons encore une fois pour ce titre très particulier.